LA OU LES CHIENS ABOIENT PAR LA QUEUE de Estelle-Sarah BULLE

Publié le par Brigitte Sabban-Weyers

LA OU LES CHIENS ABOIENT PAR LA QUEUE de Estelle-Sarah BULLE

Une grande et authentique librairie, une dédicace sans tapage, un prix, celui de ladite librairie, et le sourire lumineux de cette jeune autrice.

J’ai mis un peu de temps à le lire ( j’ai toujours énormément de bouquins d’ « avance »), mais cette période de confinement, qui étrangement, n’est pas toujours propice à la lecture, m’a permis en tout cas, de le lire, avec une certaine gourmandise.

 

 

Extraits :

« C’était le temps où nous regardions Dallas chaque samedi soir. Il n’y avait pratiquement aucun Noir à la télévision française, et absolument aucune Noire. Mais parfois, nous apercevions Sidney Poitier ou Ray Charles que ma mère adorait, des hommes bourrés de talent et sûrs d’eux, classieux, infiniment plus glamour que les Antillais que nous connaissions. Ils  nous rendaient fiers, d’une fierté toute artificielle.

Les Antillais et les Noirs américains partageaient une même expérience minoritaire et une part d’histoire commune, mais la France et les Etats-Unis ne modelaient pas du tout les individus de la même façon. Il y avait indéniablement moins de violence à subir en France mais en revanche, les Antillais n’avaient aucun modèle pour s’identifier.(…) Quelques écrivains et sportifs noirs apparaissaient de temps en temps à la télé, très peu. Aucun chef d’entreprise n’avait cette couleur de peau, aucun banquier, aucun « capitaine d’industrie », aucun trader, aucun chercheur, aucun président d’université, aucune « figure du grand banditisme », aucun évêque, aucun directeur d’une prestigieuse institution culturelle. »

 

« La grand-mère de Martha m’apprit, des larmes dans la voix, que sa petite-fille était bonniche dans le XVIème arrondissement. Elle et les autres jeunes filles parties par le même avion n’avaient reçu du Bumidom, en guise de formation, que quelques instructions pour apprendre à récurer convenablement les parquets, et un ticket de métro.

Dans les usines de là-bas, ce n’était guère mieux qu’à Darboussier. Les hommes partageaient le sort des Algériens et des Africains sur les chaînes de montage automobile ; ils étaient maltraités et humiliés. Pour éviter les échecs des premiers exilés, la plupart des nouveaux sont entrés dans l’administration ; les hôpitaux, les PTT, la RATP et des grands machins comme çà parce qu’on y aidait les Antillais à obtenir un logement. »

 

Estelle-Sarah Bulle

 

Là où les chiens aboient par la queue

 

Editions Liana Levi

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