DANS LA COUR de Pierre SALVADORI par Olivier CHARASSON

Publié le par Brigitte Sabban-Weyers

Tu peux encore y descendre si tu veux.

L'idée du casting est formidable, sur le papier déjà avant de le vérifier à l'écran : Catherine et Gustave. Tout est dans les prénoms. De Bunuel à Groland. Comme le moyen de s'affranchir, sans l'oublier, de l'héritage dont l'un et l'autre sont porteurs. Un film libre, débarrassé.

Catherine Deneuve est magnifique. On s'en fiche un peu de l'affirmer comme ça, on invente rien. Limite ça fatigue. Mais ce qui est beau chez elle aujourd'hui (je l'avais déjà perçu dans Elle s'en va), c'est de voir à quel point elle est libre, débarrassée elle aussi, de sorte qu'on perçoit chez elle non plus l'enfant qu'elle a été mais celle qu'elle est encore, celle qu'elle n'a jamais cessé d'être, alliée à l'adolescente, alliée à la jeune femme etc. Et c'est le fait des grandes actrices que de les laisser vivre toujours. Un peu comme Madeleine Renaud jouant Beckett et semblant fêter ses huit ans. À l’image, l'enfant Catherine rêve encore et fait la nique à Deneuve, et c'est bouleversant. Quant à Gustave, lui aussi a à voir avec l'enfance, non pas qu'il renoncerait ici à être adulte, mais il se désintéresse plutôt de leurs vaines ambitions, elles ne tromperont qu'eux mêmes. Prenons donc le temps de se dire bonjour puisque nous allons mourir.

C'est une comédie existentielle, grave, mais qui ne se prend pas au sérieux. Un humour dépressif, plein d'empathie, lucide, conscient que le burlesque n'est que l'envers du tragique, et que le burlesque et le tragique engagent autrement plus que la petite comédie et le drame, engagent autrement plus que nos affaires personnelles. Ils engagent notre condition toute entière et le cosmos qui va avec. C'est pourquoi Mathilde et sa fissure ont plus à voir avec Gravity et Interstellar qu'avec Larguées, Photo de famille ou La fête des mères.

Merci Olivier pour tes contributions régulières à ce blog, partager les histoires, comprendre les émotions, déployer les visions artistiques...

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